Iran: la course à la guerre

Publié le par Pierre

Ennemis jurés depuis l'établissement de la République islamique en 1979, l'Iran et les États-Unis se disputent le leadership sur le Moyen-Orient. L'acharnement contre l'ancien Empire perse s'est accéléré avec le programme nucléaire iranien.

Les États-Unis ont toujours considéré l'Iran comme une pièce maîtresse du Moyen-Orient. Dans les années 1950,  pour faire face à l'Union soviétique, Washington avait formé le pacte de Bagdad qui rassemblait la Turquie, l'Iran, le Paskistan et l'Irak. Mais dans les années 1970, cet équilibre s'effondre. En Irak, Saddam Hussein signe un traité d'amitié avec l'URSS et, en 1979, une révolution populaire en Iran force le Shah pro-occidental à l'exil et porte au pouvoir l'Ayatollah Khomeiny. Une dictature de nature religieuse, basée sur le chiisme, s'installe. Au départ, la révolution iranienne arrangeait les États-Unis dans la mesure où elle s'était débarrassée du Shah, trop indépendant, et où elle s'inscrivait en réaction contre le matérialisme athée soviétique. Puis, par sa vision fanatique de l'Islam, l'Iran a immédiatement été perçue comme une menace prioritaire. La prise en otage du personnel de l'ambassade américaine à Téhéran par des jeunes hystériques du nouveau régime en octobre 1979 n'a fait qu'augmenter les craintes de la Maison-Blanche.
Dans les années 1980, les États-Unis, l'URSS, les Pays arabes et l'Occident ont fourni l'Irak en armes et en munitions afin de mettre l'Iran à terre: en vain. Le régime islamique est resté solide, et, bon gré mal gré, les pays voisins ont dû composer lui.

Un grand pays

L'Iran est un vaste État de 1,6 million de km2, soit le 17e pays à la plus large superficie du monde. Ses 70 millions d'habitants, dont 80 % ont moins de 40 ans, font de lui un géant démographique qui devrait atteindre, selon les experts, le seuil de 90 millions en 2025. La population est homogène: 90 % sont chiites (une branche de l'Islam minortaire dans le monde musulman qui ne reconnaît que la descendance du Prophète Mahomet), et la majorité est persanophone (langue indo-européenne). Malgré des minorités sunnites, baloutches, kurdes, chrétiennes et juives, il existe une histoire millénaire commune à tous ces groupes, vieille de l'Empire perse. En attendant de devenir le pays musuman le plus peuplé de la Planète, l'Iran représente pour l'Occident et les autres acteurs de la mondialisation un formidable marché de futurs consommateurs.
L'Iran représente 11,4 % des réserves de pétrole mondiales et pèse près d'un tiers des réserves de gaz. La république islamique empêche les compagnies pétrolières américaines de désenclaver le pétrole de la Mer Caspienne, alors que les gisements iraniens se trouvent à proximité des zones d'influence américaine.

La menace d'un Empire

Malgré son infériorité technologique, l'Iran a résisté aux assauts des Irakiens pourvus d'avions français, de chars russes et de missiles américians. Le pays s'est doté d'une milice très puissante, les Gardiens de la Révolution, véritable armée parallèle, qui représentent le bras armé de la République islamique. Depuis la fin des années 1990, l'Iran cherche à développer avec l'aide de la Corée du Nord et de la Russie un programme nucléaire. Lorsque l'Irak est envahi par les Etats-Unis en 2003, Téhéran accélère le programme, officiellement civil, mais qui peut devenir militaire.

Pour les Etats-Unis, un Iran doté de l'arme nucléaire serait catastrophique. D'une part, parce que Téhéran, grand soutien des réseaux terroristes islamiques dans le monde (au Liban, à Gaza et en Bosnie, notamment), serait encouragé dans son activisme anti-occidental, avec un risque de prolifération des "bombes sales". Ensuite, parce que la perspective d'un Iran comme puissance atomique viendrait détruire le contrôle américain exclusif du Moyen-Orient et ferait de la République islamique ce qu'elle est depuis des siècles: une puissance régionale. Un Iran nucléaire favoriserait l'avènement d'un monde multipolaire, avec la Chine, la Russie et l'Inde, ce que ne veulent absolument pas les stratèges américains.

De son côté, Israël, qui considère son arsenal nucléaire comme son assurance-vie contre les régimes arabes belliqueux, n'a évidemment aucun intérêt à voir l'Iran accéder à la bombe. Le régime iranien doit composer avec une frange très conservatrice issue du clergé chiite et des Gardiens de la Révolution, pour qui Israël, Etat juif en terre musulmane, doit être purement et simplment rayé de la carte. Le président de la République islamique Mahmoud Ahmadindejad, élu en 2005, partage cette vision apocalyptique. Même si l'hypothèse d'un nouvel holocauste juif est pour l'instant peu probable, les menaces iraniennes entraînent une perte de confiance dans la supériorité israélienne et surtout une baisse de la dynamique migratoire vers Israël. Or, sans candidats à l'émigration, Israël se voit déjà perdu, surclassé par la démographie musulmane environnante. Voilà pourquoi les réseaux pro-israéliens aux Etats-Unis et en Europe, dans la presse, les gouvernements et les milieux d'affaires, tendent à représenter l'Iran comme le nouveau visage du nazisme, un "islamo-fascisme", qu'il faut neutraliser au plus vite.

Le containement

En 2006, le président américain George W. Bush, poussé par ses conseillers et les lobbies pro-israéliens, a été à deux doigts de déclencher des frappes aériennes contre les installations nucléaires iraniennes. En septembre 2007, Israël a annoncé avoir bombardé un centre de recherches nucléaires en Syrie (construit par la Corée du Nord) pour mettre en garde l'Iran.
Les Etats-Unis et Israël préparent activement l'opinion publique à la possibilité d'une guerre contre l'Iran. La France de Nicolas Sarkozy va dans le même sens depuis que le nouveau président a décidé de s'aligner sur les positions américaines. A l'automne 2007, le ministre français de la Diplomatie Bernard Kouchner a évoqué la "guerre" comme seul moyen pour stopper le programme nucléaire iranien. Le Royaume-Uni et l'Allemagne participent également aux pressions. En mars 2007, des marins britanniques ont été capturés par les Iraniens: bavure ou stratégie de la tension ?

L'Iran est encerlcé par les Etats-Unis et leurs alliés. Les militaires américains sont présents en Turquie, Irak, Koweït, Arabie Saoudite, Pakistan et Afghanistan, formant une ceinture dissuasive autour du pays. La flotte américaine croise dans le Golfe persique et dans l'Océan Indien, alors que les diplomates US multiplient les promesses pour obtenir des dirigeants des anciennes républiques soviétiques d'Asie centrale voisines de l'Iran le droit de survol. En Israël, les pilotes de chasse s'entraînent fiévreusement au bombardement des villes iraniennes. Enfin, en mai 2009, la France a installé une base militaire à Abu Dhabi, dans les Emirats arabes unis, plaçant l'armée française en premier rang dans une guerre contre l'Iran. Les accords de défense signés précisent qu'en cas d'attaque, la force nucléaire pourra être utilisée... Il s'agit d'une prise de position majeure: Nicolas Sarkozy s'engage, aux côtés des Américains et des Israéliens, à participer à un conflit armé. C'en est fini de "l'exception française" en matière de politique étrangère, qui lui avait valu des sarcasmes du côté de Washington, mais le respect de la rue du Caire et de Bagdad.

Pourtant, l'armée américaine sait que si guerre il y a, la partie sera plus difficile qu'avec Saddam Hussein. La démographie et le relief de l'Iran ne sont pas ceux de l'Irak. Des bombardements intensifs sur les sites nucléaires sont certes possibles, mais une guerre de contact exposerait l'Occident à un embrasement général du monde islamique  alors que les minorités musulmanes sont nombreuses en Europe, et à des pertes considérables.

Autant d'enjeux et d'éléments qu'il faut comprendre avant de se lancer tête baissée dans une nouvelle guerre "au nom du Bien".

Publié dans International

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I
<br /> C'est simple les chiites sont dangereux, ils veulent seulement découler sur les pays sunnites. à lire le petit livret de Khomeïni, assurément très drôle dans certains passages. Les chiites ont mis<br /> en place le mariage temporaires alors que si divorcer n'est pas interdit en islam il n'en reste pas moins un acte détestable, donc ils peuvent se marier avec une femme pour coucher avec puis la<br /> divorcer.<br /> En Irak maintenant, si tu as le "malheur" de t'appeler 'Omar ou 'Aïsha tu peux te faire tuer à chaque instant, les chiites qui constituent 70% la population persécutent les sunnites, ils tuent même<br /> des enfants qui portent les noms de compagnons qu'ils maudissent ou des fillettes appelées 'Aïsha. Il y avait un témoignage d'un homme qui avait appelé un savant musulman et qui lui racontés les<br /> atrocités que les sunnites subissent en Irak. Alors si le chiisme découle partout dans le monde hum hum.<br /> Ah et l'Iran interdit les mosquées sunnites mais autorisent les synagogues et les églises, et puis elle a quand même laissé les USA attaquer l'Afghanistan (de peur qu'il y ait véritablement un Etat<br /> Islamiqe) et a dit "faites attention, ne visez pas les mosquées", alors qu'encore une fois Muhammmad (pbDl) a dit : "la mort d'un musulman est plus grave que la destruction de la Mecque". QUI sont<br /> donc véritablement ces gens..à deux facettes. Et pourtant je serai presque leurrée quand j'entends le président iranien fustigé l'entité sioniste (ce sur quoi il n'a pas tort.. maintenant à savoir<br /> pourquoi il défend la Palestine, et pourquoi il laisse attaquer l'Afghanistan hum hum).<br /> <br /> <br />
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